Un recours abusif au CDD’U
Le recours abusif à des contrats à durée déterminée d’usage (CDD’U) conduit à la précarisation de ces salariés de droit privé. La convention collective est pourtant sans équivoque : le CDI doit s’imposer.
Les formateur·ices, les enseignant·es-formateur·ices et les enseignant·es de droit privé se voient parfois imposer un contrat à durée déterminée d’usage (CDD’U), sur une fraction d’année ou pour une année entière. Ces CDD’U s’enchaînent d’une année sur l’autre. Le salarié·e est alors constamment dans l’incertitude de la reconduction et, de ce fait, vulnérabilisé dans l’exercice de son métier et dans son rapport à sa hiérarchie.
C’est la raison pour laquelle le CCD’U est encadré par la réglementation du travail comme une disposition dérogatoire du CDD. Et cette dérogation est très restrictive.
Notre convention collective (CCN EPNL, IDDC 3218, art. 3.3.7) rappelle que le CDD’U est certes une disposition applicable à certains secteurs d’activité dont celui de l’enseignement mais sous certaines conditions. Une utilisation abusive du CDD’U a été constatée dans plusieurs établissements et la jurisprudence est très claire à ce sujet : « les enseignants qui sont recrutés pour toute la durée de l’année scolaire et pour dispenser un enseignement entrant chaque année dans le programme de l’établissement doivent l’être par contrat à durée indéterminée (CDI) ».
Les jurisprudences
Le principe d’interdiction du CDD’U a été confirmé à plusieurs reprises :
- pour des salariés employés comme enseignants au sein d’un établissement d’enseignement privé en vertu de contrats conclus pour la durée de l’année scolaire et à qui l’employeur avait fait savoir que leur contrat prendrait fin au terme de l’année scolaire en cours (Cass. soc. 26 juin 1991, n°87-43.358, n°2602P) ;
- pour un professeur d’espagnol embauché par une association pour la formation des cadres pour la durée d’une année scolaire ou universitaire. En l’espèce les contrats s’étaient succédé pendant 3 ans sans autre interruption que celles des vacances scolaires (Cass. soc. 16 janv. 1992, n°89-41.325, n°210P) ;
- pour un enseignant engagé pour toute ta durée de l’année scolaire pour donner des cours de français et de culture générale, disciplines enseignées de façon permanente dans l’établissement et ce même si le nombre d’élèves était incertain d’une année sur l’autre (Cass. soc. 10 juin 1992, n°88-44.433, n°2507P) ;
- pour un professeur d’allemand dans un collège ; (Cass. soc. 2B oct. 1992, n°89-45.441, n°3620P) ;
- pour un professeur de droit engagé pour toute ta durée de l’année scolaire et dont les contrats s’étaient succédés pendant 7 ans; (Cass. soc., 17 mars 1993, , n°89-43.328) ;
- pour un formateur engagé dans un centre de formation d’apprenti par 14 CDD successifs durant 14 années scolaires (Cass. soc. 23 janv. 2008, n°06-44.197, n°152 FP-P +B) ;
Il résulte de ces différents arrêts que l’enseignement visé par ce cas de recours au CDD’U est en fait un terme générique qui s’applique aussi bien aux cours qui sont dispensés dans des établissements soumis aux cycles scolaires ou universitaires qu’aux formations assurées par des organismes sous forme de stages ou de modules dans le cadre de la formation permanente notamment. (Circ. DRT n°92-14, 29 août 1992, n°8 : BO trav. n°92/21)
En revanche, les tâches ou les emplois qui ne relèvent pas de l’enseignement proprement dit, mais qui sont seulement liés à son organisation ne permettent pas la conclusion de contrats précaires. II en est ainsi notamment d’un emploi de conducteur de car scolaire (Cass. soc., 13 nov. 1990, Bull. civ. V, n°541) ou bien encore d’un emploi de surveillant général (CA Versailles, 3 mars 1988)
Les enseignant·es qui sont recruté·es pour toute la durée de l’année scolaire et pour dispenser un enseignement entrant chaque année dans le programme de l’établissement doivent l’être par contrat à durée indéterminée (CDI) (Circ. DRT n°18/90 du 30 octobre 1990, NOR : TEFT9010350C, Chapitre 132 : Les emplois pour lesquels il est d’usage constant de ne pas recourir au contrat de travail à durée indéterminée).
Les circulaires successives et la jurisprudence ne laissent aucun doute. Elles sont antérieures à la nouvelle mouture de la Convention collective de 2022 (CCN EPNL IDCC3218).
Celle-ci est très claire :