Omerta dans l’enseignement catho : dans l’académie de Versailles aussi

Déclaration liminaire de la CGT-EP à la CCMA de Versailles du 6 mars 2025 en version imprimable

 

Le « Pas de vague » ce n’est pas qu’à Bétharram.

Ci-dessous, la déclaration liminaire des élu·es CGT de la CCMA* au rectorat de Versailles du 6 mars 2025.

DECLARATION LIMINAIRE DE LA CGT-EP CCMA DU 6 MARS 2025

 

Pour transmission à Madame La Ministre de l’Education Nationale.

Mesdames, messieurs, chers collègues,

Des décennies de violences, de déni et d’omerta, et aujourd’hui plus d’une centaine de plaintes : l’affaire Notre-Dame-de-Bétharram, du nom de cet établissement catholique du Béarn, est le premier scandale d’ampleur qui frappe une école en France. Au cœur des questionnements : l’absence de réaction des institutions, le soutien des notables locaux contre les lanceurs d’alerte“ (Mediapart/ 28 février)

Voilà ce que l’on peut lire dans la presse ces derniers jours.

Est-ce que cette affaire nous étonne ?
NON.

Des révélations de plaintes, de signalements enterrés …
Une mécanique du silence bien rodée…
Est-ce que l’académie de Versailles échappe à ce principe d’inertie?
NON.

À Versailles, il y a l’affaire Ile-de-France, du nom de cet établissement catholique de Villebon-sur- Yvette,
Un petit établissement sans histoire, un collège et lycée de huit cents élèves.

Puis … Un changement de direction, la mise en place d’un management plus autoritaire, peu enclin à l’échange, à la discussion. Des personnels qui démissionnent, des enseignants plus nombreux qui demandent à participer au mouvement… Un élément qui aurait pu ou dû alerter le rectorat.

En 2019, l’établissement recrute un nouveau surveillant. Un surveillant docile et acquis à la direction.

Très vite, des interrogations sur sa manière d’agir avec les élèves, des signalements sur des comportements déviants. Le caractère sexuel de ses agissements est clairement dénoncé.

Les adultes de l’établissement sont rapidement informés et face à l’inaction de la direction, décident de passer outre le chef d’établissement, en s’adressant directement à la protection de l’enfance, à l’évêque d’Evry, au recteur de l’académie, aux institutions judiciaires.

Mais, malgré des plaintes pour harcèlement moral et sexuel, malgré un signalement à la protection de l’enfance, malgré des alertes répétées au rectorat et aux instances catholiques chargées de l’enseignement, ce surveillant reste en poste.

Pire, les différentes plaintes sont classées sans suite et ce sont les personnels lanceurs d’alerte qui sont incriminés, une enquête est même menée par le Chef d’établissement pour savoir s’il y a eu harcèlement à l’encontre du surveillant. Paradoxalement, le même chef d’établissement ne dirige aucune enquête sur les agissements du surveillant vis-à vis des élèves. Quant au Rectorat de Versailles, il ne juge pas utile de déclencher “une procédure disciplinaire pour faute grave dans l’exercice de ses fonctions, inconduite ou immoralité “, procédure qui ne s’applique pas seulement aux enseignants mais aussi à ” à toute personne attachée à la surveillance d’un établissement d’enseignement privé ”, procédure qui aurait pu “ interdire l’exercice de sa profession temporairement ou définitivement” à ce surveillant, selon le code de l’éducation, article L914-6.

Inertie du Chef d’établissement, inertie de la tutelle congréganiste, inertie du Rectorat.

Un rythme ternaire qui sonne mal, qui ne souligne pas l’excellence mais la négligence.

Une parole des enfants non entendue, une parole des adultes non écoutée, un balancement inacceptable.

19 mai 2022, une victime fait une tentative de suicide au sein de l’établissement.

La famille est seule. Pas de démarche du CE, pas de démarche du Rectorat.

Au contraire, le CE réaffirme publiquement sa confiance au surveillant et menace tout élève ou adulte qui, selon lui, “alimenterait des rumeurs”.

Début 2023, le surveillant est accusé de harcèlement sexuel et de viol par une élève. Cette dernière est renvoyée. Une enquête est ouverte depuis le 22 février 2023 au parquet d’Evry. Si le surveillant ne semble plus en contact avec les enfants, il fait encore partie de l’établissement.

Malgré un tsunami de témoignages, de preuves, la tutelle congréganiste, le Diocèse comme le Rectorat ont privilégié une politique du “Pas de vague”, une politique où pour couvrir des adultes déviants, on a exposé des enfants et bâillonné la parole des adultes lanceurs d’alerte.

Un silence criant, un silence glaçant.

Il y a Bétharram, il y a Ile de France… et combien d’autres encore que l’on a muré dans le silence. Il est temps de déconstruire cette mécanique.

La CGT-EP souhaite que l’Eglise comme l’Etat prennent leurs responsabilités pour que ces violences systémiques prennent fin.

La CGT EP rappelle qu’il est urgent d’exercer des contrôles dans les établissements privés sous contrat pour les situations de violences comme pour celles de souffrance au travail des personnels.

Pour cela, il est essentiel que les chefs d’établissement restent sous le contrôle des autorités académiques ainsi que les textes le prévoient. Mais surtout il faut que le Rectorat exerce concrètement son autorité conformément au code de l’éducation et mette un terme à la politique du “Pas de vague”.

 

* CCMA : Commission Consultative Mixte Académique
L'enquête de L'Humanité et le reportage
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