Réforme du lycée : BLANQUER IS BAC !

Le ministre de l’Éducation nationale a présenté le 14 février sa réforme du baccalauréat session 2021. Sans surprise, ce bac entérine la mise en place d’un lycée du tri et de la sélection qui aura pour conséquence de creuser les inégalités entre les élèves, d’alourdir la charge de travail des enseignant·es et de supprimer des postes. On vous explique pourquoi…

Le nouveau bac, comment ça va marcher ?

La première session du bac Blanquer aura lieu en 2021, elle concerne donc tous les élèves qui entreront en 2nde générale et technologique en septembre 2018.

Ce qui ne change pas :
– pour obtenir le bac, le candidat devra obtenir une moyenne générale de 10/20,
– il n’y pas de note éliminatoire ou plancher,
– le système actuel de compensation et de mention est maintenu, l’oral de rattrapage est maintenu.
Ce qui change :
La structure de ce bac est pensée pour que 75 % des résultats soient pris en compte dans Parcoursup. L’organisation de nombreuses épreuves reposera sur les établissements et les enseignant·es.
La note sera composée de deux blocs :
Et pour les langues vivantes ? La prise en compte du contrôle continu Des « épreuves anticipées
et terminales »
L’évaluation des langues vivantes se fera via les épreuves communes pour l’écrit, et à l’oral à partir de février l’année de terminale, selon les dispositions actuelles. La logique de certification a vocation à se développer. 40% du résultat final 60% du résultat final
Cette note sera composée de la prise en compte des bulletins scolaires (10% de la note finale) et d’épreuves communes organisées pendant le cycle terminal. Leur organisation relèvera des établissements.
A titre indicatif, ces épreuves pourront avoir lieu en janvier et en avril en 1ère, puis en décembre en terminale.
Pour « garantir l’égalité entre les candidats et les établissements scolaires », une banque nationale numérique de sujets sera mise en place.
Les copies seront anonymisées et elles seront corrigées par d’autres professeurs que ceux de l’élève.
Français
(oral et écrit)
En fin de 1ère
Deux épreuves écrites portant sur les deux disciplines de spécialités Au retour des vacances de printemps
Philosophie Fin juin
Un grand oral Fin juin

Quelle structuration pour le nouveau lycée ?

L’enseignement au lycée sera décomposé en quatre parties :

Première Terminale
Le socle de culture commune (tronc commun)
Français 4h
Philosophie 4h
Histoire-Géographie 3h 3h
EMC 0h30 0h30
LV1 et LV2 4h30 4h
EPS 2h 2h
Humanités scientifiques et numériques 2h 2h
Total maxi : 16h 15h30
Les disciplines de spécialité :
en fin de 2nde, l’élève choisit 3 discipline de spécialité pour la 1ère en n’en conserve que 2 en Terminale
Arts 4h 6h
Histoire-Géographie, géopolitique et sciences politiques 4h 6h
Humanités, littérature et philosophie 4h 6h
Langue et littératures étrangères 4h 6h
Mathématiques 4h 6h
Numériques et sciences informatiques 4h 6h
Sciences de la Vie et de la Terre 4h 6h
Sciences de l’ingénieur horaire spécifique horaire spécifique
Physique Chimie 4h 6h
Total maxi : 12h 12h
L’orientation
1h30 1h30
Les enseignements facultatifs :
un seul enseignement possible en 1ère, possibilité d’un second en Terminale
Arts 3h 3h
LCA 3h 3h
EPS 3h 3h
LV3 3h 3h
Mathématiques expertes 3h
Mathématiques complémentaires 3h
Total maxi : 0 ou 3h 0 ou 3h ou 6h

 

Que se passe-t-il à la rentrée 2018?

A la rentrée 2018, la classe de 2nde ne connaîtra pas de changement organisationnel majeur mais de premières évolutions destinées à installer l’esprit du baccalauréat 2021:
· un test numérique de positionnement en début d’année (mathématiques et français).
· de l’accompagnement personnalisé tout au long de l’année axé sur la maîtrise de l’expression écrite et orale.
Une aide à l’orientation pour accompagner vers la classe de 1ère (54h/an)
Les dotations horaires ayant déjà été attribuées aux établissements pour la rentrée prochaine, ces 54h vont-elle être allouées en plus ? On en doute. Alors sur quelles économies seront-elles prélevées ?

Par ailleurs, le Conseil Supérieur des Programmes a été saisi pour proposer le contenu des nouveaux programmes pour les classes de 1ère et terminale à compter de la rentée 2019 (publication prévue en décembre 2018).

L’analyse de la CGT Enseignement privé

La menace de l’annualisation du temps de travail des enseignants et la remise en cause des ORS (Obligations Réglementaires de Service) est écartée (pour l’instant), et l’usine à gaz Majeures/Mineures proposée par P. Mathiot abandonnée, constituant ainsi un recul par rapport au projet initial.

Si en soi, briser la hiérarchie qui n’a pas lieu d’être entre les filières actuelles (S – ES – L) n’est pas une mauvaise chose, nous ne pouvons être en accord avec l’instauration de ce lycée qui trie en spécialisant précocement (fin de 2nde) alors que beaucoup d’élèves ne savent pas à cet âge-là ce qu’ils envisagent pour leur avenir. Les choix de spécialités engageront fortement pour l’entrée à l’Université. Il faudra donc faire les bons choix, très tôt. Le développement des « coach en orientation » à un bel avenir devant lui !

Les petits établissements pénalisés ?

Concernant l’offre des spécialités, toutes ne seront pas proposées dans tous les établissements, il y aura des choix locaux, accentuant une rupture d’égalité sur le territoire pour l’offre d’enseignement, élément supplémentaire dans l’autonomie des établissements.
Chaque lycée aura sa cote, chaque bac aura sa valeur.

Par ailleurs, on peut craindre des tensions au sein des équipes en place pour le maintien des heures disciplinaires et le choix des spécialités proposées.
Certaines disciplines sont clairement en danger. On peut noter la faible présence des sciences dans le tronc commun.

Si dans le public, les Conseils d’Administration auront la possibilité de donner leur avis sur les choix retenus, qu’en sera-t-il dans les établissements privés ? Il y a fort à parier que dans nos établissements, les choix seront guidés par des critères de clientélisme…

Ce lycée est à l’opposé du lycée et, plus largement, de l’école que nous voulons : une école qui émancipe, qui fournit une culture générale et technologique commune et permet la formation de citoyen.nes éclairé.es.
Le lycée n’a pas pour vocation unique la préparation aux « attendus » du supérieur, pour satisfaire aux critères de Parcoursup, ce qui est pourtant le leitmotiv de la communication ministérielle.
Pour les élèves, tous ces partiels les mettront sous pression continuelle, pendant les deux années du cycle terminal, avec un risque de bachotage (dénoncé par le ministre…) qui sera multiplié par… 4.

Nous allons devoir organiser 4 épreuves de bac au sein des établissements entre la classe de 1ère et de Terminale.
Est-ce une  simplification ou une réelle économie pour le ministère ?

Quelles conséquences pour les profs ?

Pour les personnels, il est évident qu’à plus ou moins long terme, il y aura des réductions du nombre de postes. Avec la fin des séries et le regroupement des élèves pour chaque enseignement de spécialité, les besoins seront moins importants. Une belle économie en perspective pour le ministère…

La charge de travail va augmenter, avec les partiels et leurs corrections. L’expérience de nos collègues de Lycée Pro et leur pratique du CCF devrait nous alerter. La pression va se généraliser sur les équipes en place après chaque résultat de partiels.

Ainsi, sous prétexte de « moderniser » le bac (bel effet de com’),  nous sommes donc face à une nouvelle étape dans la construction d’une école du tri social.

Tout comme la réforme du code du travail, ce changement contribue à développer une société de l’individualisme, de la concurrence généralisée, en cassant les repères.

La CGT Enseignement privé refuse ce projet tel qu’il est et revendique une scolarité obligatoire jusqu’à 18 ans, dans un grand service public, laïc et gratuit d’éducation, qui offre une culture commune et ambitieuse à tou.tes au service de l’épanouissement personnel, de la participation éclairée à la vie collective, au service de l’intérêt commun.

Empoignades dans la salle des profs ?
Un certain nombre de matières pourront être partagées par des enseignants de différentes disciplines, ce qui laisser présager de belles empoignades dans les équipes pour répartir ces enseignements, notamment dans un contexte de perte d’heures…

Ce lycée est à l’opposé du lycée et, plus largement, de l’école que nous voulons : une école qui émancipe, qui fournit une culture générale et technologique commune et permet la formation de citoyen·nes éclairé.es.

Une autre vision de la société

Des éléments différents pour le privé ? CALENDRIER DE MISE EN ŒUVRE
Les éléments de cette réforme ouvrent la voie à une autonomie accrue des établissements. Dans le public, le rôle du conseil pédagogique est prépondérant. Or, cette Instance n’existe pas, ou pas officiellement dans le privé… Pour la transparence, ce n’est pas gagné.
Et rappelons que contrairement à nos collègues du public, si nous n’avons pas un temps plein, ce qui risque de se produire dans certaines disciplines, nous ne sommes rémunérés qu’à proportion du nombre d’heures effectuées! Il y a fort à parier que les temps incomplets, déjà trop nombreux, vont se multiplier.
  • Février 2018 : saisine du Conseil Supérieur des Programmes sur le lycée.
  • Mars-avril 2018 : concertation technique sur les modalités de mise en œuvre.
  • Rentrée 2018 : des « ajustements indiquant l’esprit du nouveau baccalauréat » et des tests de positionnement en 2nde.
  • Décembre 2018 : publication des programmes.
  • Rentrée 2019 : choix de 3 disciplines de spécialité pour les élèves de 1ère, introduction d’un contrôle continu, épreuves anticipées de français.
  • 2020/2021 : mise en œuvre de la réforme en Terminale et première session du nouveau baccalauréat.
A la CGT, le lycée que nous voulons !
  • Nous souhaitons une école qui permette à tou.tes de réussir et qui n’a pas comme fonction de trier les élèves,
  • Nous voulons une école qui fournit une culture générale et technologique commune, qui émancipe et permet la formation de citoyen.nes éclairé.es.
  • Nous réaffirmons notre attachement au maintien du bac comme 1er grade universitaire et seule condition d’entrée à l’université et non outil de sélection pour le supérieur.
  • Nous préférons la coopération plutôt que la mise en concurrence des établissements.
  • Nous demandons une baisse des effectifs par classe (24 au lycée).
  • Nous sommes contre l’annualisation du temps de travail des enseignant·es.
  • Nous rappelons notre attachement à la liberté pédagogique des enseignant·es.
Réforme de la SNCF et Réforme du Bac :
Une même logique ?
Dans son projet pour la SNCF, sous prétexte de modernité et d’adaptation à la concurrence, le gouvernement va in fine supprimer les petites lignes (les moins rentables!) et raboter le statut des personnels. Côté éducation Nationale, cette réforme du Bac conduira à n’en pas douter à mettre en difficulté les plus petits établissements, qui ne seront pas en mesure de proposer toutes les spécialités. Le risque de fuite vers les grandes métropoles est fort, avec son lot de concentration, et de suppression de postes d’enseignant·es.
Un exemple: aujourd’hui, un établissement avec 90 élèves en classe de 2nde perçoit une DHG équivalente à 3 classes avec dédoublement.
A partir de la rentrée prochaine, la DHG sera comptabilisée pour 2 classes de 2nde à 35 et pour une classe de 2nde à 20 (sans dédoublement pour cette dernière). Bilan, 10 heures d’économies en heures-profs!
Dans le cas de la SNCF comme du Bac, il ne s’agit pas d’aller vers davantage de progrès, mais bien de réduire le coût des services publics, au détriment des usagers et du personnel !

Pour l’Enseignement Privé, nous demandons la création d’une véritable instance élue au sein des établissements pour valider les choix des équipes pédagogiques, sur le modèle des Conseils d’Administration du public. Un exemple: aujourd’hui, un établissement avec 90 élèves en classe de 2nde perçoit une DHG équivalente à 3 classes avec dédoublement.

 

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