Salaires : SOCLE et PACTE … analyse CGT

Mise à jour du 6/05/2023 : Dossier de presse Réforme du Lycée professionnel
Mise à jour du 24/04/2023 : le passage des Maitres délégué·es sur les grilles indiciaires des contractuel.les du Public est confirmé ce jour.
Rémunération des enseignants et enseignantes Ni aumône ni Pacte (Communiqué de presse CGT Educ)
Des professeurs mieux rémunérés pour une école qui change (le dossier de presse du MEN)
Article très complet du Monde du 22/04/2023

1er trimestre 2023

 

Ce premier trimestre 2023, le ministère a organisé trois réunions successives sur les questions de revalorisation salariale. Les principales propositions pour l’Enseignement privé sont très largement identiques à celles présentées à l’Enseignement public.
Seule la question de la revalorisation de l’échelle de rémunération des Maitres Auxiliaires est spécifique au Privé : c’est l’unique bonne nouvelle… si elle est réellement appliquée (cf mise à jour ici)

Constat des syndicats : les principales « revalorisations » salariales portées par l’administration ne correspondent absolument pas aux demandes que portent la CGT et la majorité des autres syndicats.

    • Quantitativement : on est loin des 10% de salaires annoncés dans les médias.
    • Qualitativement : ces « revalorisations » ne sont pas « indiciaires » mais « indemnitaires ». Pour parler clair : ce n’est pas du salaire pérenne mais un ensemble d’indemnités supplémentaires toujours susceptibles d’être supprimées.
    • Enfin, la promesse de reconnaitre par du salaire les tâches jusqu’ici bénévoles n’est pas tenue. Ainsi, dans le Premier degré, la prise en charge des élèves des collègues absent·es (formation, maladie…) n’entrainera aucune valorisation salariale. Cela restera du bénévolat.

Il a été très vite clair que :

  • les moyens proposés (3 milliards en « année pleine » soit 4/12 de 3 milliards pour septembre-décembre 2023) pour le public et le privé confondus sont insuffisants pour combler des années de retard d’augmentation et rattraper le niveau de rémunération de nos collègues européen.nes.
  • les effets d’annonces et éléments de langage du Ministère sont destinés (de nouveau) à masquer l’indigence de ses propositions « Pacte », « 3 milliards », « reconnaissance »…
  • de fait, le Ministère compte utiliser ces sommes pour ses objectifs à lui.

Ce qui intéresse le Ministère ?

    • Pallier les difficultés de recrutement d’enseignant·es en rendant les métiers plus « attractifs » = augmentation des rémunérations de début de carrière
      = C’est l’objectif essentiel du Socle (nom donné à l’augmentation sans contrepartie)
    • Trouver des enseignant·es à mettre devant les élèves en cas d’absences d’un prof (2nd degré). Jusqu’ici les « remplacements de courte durée » sont rémunérés en heures supplémentaires aux enseignant·es qui choisissent de remplacer leur collègue absent·e. Ce serait dorénavant une des obligations incombant au signataire du Pacte rétribuée en indemnité.
      = C’est le but essentiel du Pacte (nom donné à « l’augmentation »… contre travail supplémentaire, ce qui n’est donc pas une augmentation)

Les annonces du 20 avril et des 4/5/6 mai 2023 (LP)

Les annonces officielles de la décision du Ministre quant au scénario choisi devaient intervenir initialement début mars.
Finalement, ce n’est que le 20 avril que Pap Ndiaye communique sur les choix retenus. Il ménage le suspense et réintervient le 4 mai pour les annonces sur le Lycée professionnel.

Plusieurs constats : comme on pouvait le prévoir, les « centaines d’heures de concertation » avec les organisations syndicales n’ont absolument pas infléchi le contenu de cette revalorisation. C’est la continuation de la méthode Blanquer : on fait plein de réunions dont on ne tient absolument pas compte.

  • il ne s’agit pas d’augmentation de salaire, mais de l’attribution de « primes » sous forme d’indemnités
  • le chiffre annoncé de 10% d’augmentation est bien un leurre. D’abord, c’est 10% en moyenne et surtout ces 10% sont calculés en intégrant toutes les sommes perçues depuis 2020 (la prime informatique, l’augmentation du point d’indice, la prime d’attractivité….)
  • le « pouvoir d’achat des personnels » déjà fortement érodé par le niveau de l’inflation et l’absence pluriannuellle d’augmentation de salaires continue de diminuer. Les annonces gouvernementales ne réussissent pas à combler cette érosion. Encore moins à rattraper le retard pris depuis 40 ans (cf graphique ci-contre)

Les mesures présentées ce 20 avril ne constituent donc ABSOLUMENT PAS UNE REVALORISATION.

Si on rentre dans le détail : le Pacte qui doit être mis en place au 1er septembre 2023 va entrainer de nouveaux problèmes.

Nouvelle accentuation des inégalités

Le Pacte accentue trois inégalités déjà très prégnantes :

  • Inégalités femmes-hommes : les augmentations de rémunération via des tâches supplémentaires favorisent les hommes. En effet, les tâches liées à la famille incombant davantage aux femmes, elles disposent moins du temps nécessaire pour travailler au delà des obligations réglementaires. Ce sont déjà les hommes qui accèdent davantage aux heures supplémentaires. Ce sont eux qui accéderont davantage au Pacte.
Ce problème a été systématiquement soulevé par la CGT lors des réunions au Ministère. Sa réponse : nous avons résolu ce problème, les femmes pourront disposer d'un 1/2 Pacte.... 🤔. LA solution aux inégalités salariales entre hommes et femmes est pourtant connue, c'est l'augmentation du salaire. Ce n'est pas celle retenue par le Ministère.
  • Inégalités précaires-titulaires : comment échapper à la démultiplication des tâches qui risquent d’être imposées sous couvert de « Pacte » ? Le Ministère n’a pas su répondre à cette question qui pointe les dérives de certains chefs d’établissement coutumiers des pressions à l’encontre des maitres délégué·es. Lorsqu’on est précaire de l’enseignement privé et qu’on souhaite éviter d’être blacklisté·es des listes de remplaçant·es par les DDEC, on risque de se sentir « contraint·e  » d’accepter le Pacte et des missions bien au-delà de ce qui est prévu « officiellement » dans la lettre de mission.
  • Inégalité entre les échelles de rémunération : les missions du Pacte sont, de fait, quasiment réservées aux certifié·es et agrégé·es. Les professeur·es des écoles auront du mal à trouver le temps et les espaces nécessaires pour entrer dans ce système de tâches supplémentaires. Les professeur·es de Lycée professionnel sont tout simplement exclu·es du Pacte à 3 briques empilables. Leur Pacte est annoncé comme lié à la réforme de la voie pro (mise en suspens à cause de la lutte contre la réforme des retraites). (cf mise à jour du 7/05/2023)

une dérégulation des obligations réglementaires de services (ORS)

Au bout du bout, le Ministère fait entrer dans les établissements une nouvelle manière d’être rétribué·e.

Jusqu’ici, un·e enseignant·e est rémunéré·e :

  • par heure de travail (ORS de 15, 18, 20, 24 ou 36 heures selon le statut). Toute heure au-delà est payé·e en heure supplémentaire (sauf pour les Profs des écoles et les profs documentalistes)
  • par mission : une tâche est attribuée à l’année et une indemnité rétribue cette mission via une Indemnité pour Mission Particulière (IMP ou portion d’IMP)

Avec le Pacte des professeur·es 1er et 2nd degré (hors LP), 1 à 3 indemnités annuelles de 1250 euros bruts sont versées en contrepartie d’un ensemble de « tâches » fixées conjointement par l’enseignant·e et le chef d’établissement. C’est une forme de rémunération à la carte.

Pour le Lycée professionnel, les briques sont au nombre de 5 et … non sécables pour un total de 7 500€ bruts (p.28 du Dossier de presse du 5/05/2023). Pour être clair, c’est soit 5x24h en plus, soit rien du tout. Comment le ministère compte-t-il faire autant travailler les collègues en plus ? On peut supposer qu’il considère d’ores et déjà que ce pourrait être durant les PFMP….

Quatre remarques :

  • C’est une usine à gaz qui va renforcer les « hiérarchies locales ».  En contrepartie d’une indemnité, le chef d’établissement sera responsable de l’évaluation des besoins, de la demande au rectorat, de la répartition des missions entre les enseignant·es et de la vérification des tâches accomplies…
  • C’est une boite de Pandore qui conduira à déréguler les obligations de service et épuiser les personnels : 1 indemnité contre plusieurs « missions » alors que les services du Ministère ont évalué à 43h le travail hebdomadaire des enseignant·es et que les démissions et demandes de ruptures conventionnelles explosent.
  • La case Brique 1 est indispensable pour accéder aux cases suivantes. Plus clairement, si on ne fait pas de remplacement de courte durée (2nd degré) ou de soutien en 6e (1er degré), impossible d’atteindre la Brique « rémunération des projets ». Bien sûr , il sera toujours possible de faire ce travail bénévolement … Au vu du mépris que ce système démontre, gageons plutôt que les collègues risquent de ne plus construire de projet. Pire en LP, c’est 1 grosse et unique brique dans laquelle s’empilent pêle-mêle : heures de remplacement, cours de langues, orientation, lien avec les entreprises, lutte contre le décrochage ….
  • À terme, il serait prévu que les heures supplémentaires (remplacement de courte durée) et IMP disparaissent (700 millions d’€ d’économie). En découlerait une forme de passage obligé par le Pacte (obligation initialement annoncée pour les entrants dans le métier). A noter que l’enveloppe Pacte est de 1,1 milliards mais en contrepartie de bien plus de missions qu’IMP et HS confondues. Rien ne certifie que cette indemnité perdure : si elle part, il y a fort à parier que les « missions » resteront.

Conclusion

  • L’alignement du montant de l’ISAE sur celui de l’ISOE et l’augmentation des indemnités ISOE/ISAE et de sujétion vont certes entrainer une hausse mensuelle de presque 100€ (bruts !) des rémunérations mais une hausse des salaires par réévaluation des grilles salariales aurait été préférable.
  • Même remarque pour la « prime d’attractivité » qui ne concerne que les enseignant·es entre les 1er et 9ème échelons. Cette prime va certes être revalorisée mais ça reste une prime (et non du salaire) et cette revalorisation ne concerne pas les enseignant·es des échelons 8 et 9. Au delà du 9ème échelon (18 à 22 ans de carrière) : pas de prime et donc pas de revalorisation de prime non plus.
  • L’amplification de l’ouverture des accès à la hors classe et classe exceptionnelle ne va modifier le parcours que de quelques milliers de personnels sur les 850 000 personnels de l’éducation. Concrètement ça signifierait que l’accès à la Hors-classe serait avancé d’un an pour certain·es.
  • Un certains nombre de personnels du Ministère sont exclus de la revalorisation. Dans le Privé, les AESH n’auront aucune revalorisation alors qu’elles représentent le 2ème corps de l’Éducation en nombre (le dernier en terme de montant de salaire).

Nous appelons les collègues à refuser de rentrer dans le système du Pacte et à rejoindre en nombre les cortèges des mobilisations, notamment celui du 1er mai. #nonauPacte #Nonàlaréformedesretraites

Madame, Monsieur, chères et chers collègues,

La revalorisation des rémunérations et des carrières des professeurs sera effective à partir du mois de septembre 2023 et se concrétisera par des mesures importantes, fruits d’une centaine d’heures de concertation menées avec les organisations syndicales. C’est un engagement que j’avais pris dès ma nomination, conformément à la volonté du Président de la République qui l’a annoncé ce jour au collège Louise-Michel de Ganges dans l’Hérault, et de la Première Ministre : mieux reconnaître votre implication dans votre métier, si essentiel pour notre société et pour l’avenir du pays. Cela est permis par un budget de l’éducation nationale en augmentation inédite. Plus de 3 milliards d’euros sont dédiés, en année pleine à la hausse des salaires des professeurs.

Cette augmentation de rémunération s’adresse à vous, qui faites partie des 850 000 professeurs et personnels d’éducation, professeurs des écoles, professeurs certifiés, professeurs agrégés, professeurs d’éducation physique et sportive, professeurs de lycée professionnel, psychologues de l’éducation nationale, conseillers principaux d’éducation.

Elle se traduit d’abord pour tous par un doublement du montant des primes (ISAE et ISOE pour les professeurs), sans condition. Elle se traduit aussi par une accélération des promotions dans les deuxièmes moitiés de carrière grâce à un accès plus ouvert à la hors-classe et à la classe exceptionnelle. Les rémunérations des débuts de carrière sont augmentées grâce à la hausse de la prime d’attractivité. Un professeur titulaire commencera dorénavant sa carrière avec une rémunération nette supérieure à 2 000 euros. Ainsi, ce sera, en fonction des situations, entre 100 et 200 euros nets de plus par mois.

En outre, ceux qui le souhaitent pourront exercer des missions complémentaires. Elles seront attractives car elles compléteront significativement vos salaires et seront mieux rémunérées que les heures supplémentaires. Elles donneront chacune droit à une rémunération forfaitaire de 1 250 euros bruts annuels, soit 3 750 euros bruts annuels pour 3 missions. Elles permettront de favoriser la réussite des élèves, en assurant prioritairement la mission de remplacement de courte durée dans le second degré, et l’intervention des professeurs des écoles pour le soutien en 6ème dans le premier degré, à raison d’un engagement de 18 heures pour une année scolaire. Elles permettront aussi, pour un forfait de 24 heures à l’année, d’assurer par exemple du soutien dans le premier degré, "Devoirs faits" en classe de 6ème, etc. Ces missions seront aussi des missions de coordination des projets pédagogiques innovants dans le cadre du CNR Education « Notre école, faisons-la ensemble », de mise en œuvre de la découverte des métiers au collège, de professeur référent pour le handicap, etc. Les professeurs de lycées professionnels seront totalement intégrés à ces missions, dans le cadre de la réforme du lycée professionnel qui sera précisée prochainement.

Madame, Monsieur, chères et chers collègues, je saisis l’occasion de vous écrire directement pour vous renouveler mon estime et pour vous remercier très sincèrement pour votre travail quotidien auprès des enfants et des adolescents de notre pays. Cette revalorisation des salaires qui sera effective dès le mois de septembre, elle est méritée, elle est pour vous.

Avec mes salutations dévouées et très cordiales, .

Pap NDIAYE

 

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